Où en sommes-nous avec le surréalisme ?
A voir depuis ces vingt dernières années le battage médiatique autour du surréalisme, à voir le nombre d’expositions qui lui sont consacrées dans les musées du monde entier, à voir les prix parfois astronomiques qu’atteignent les œuvres qu’il a produites, on peut répondre qu’on assiste à une véritable neutralisation du projet surréaliste, qui, à, l’origine était un mouvement subversif. Le surréalisme n’est pas le mouvement artistique tel qu’on voudrait nous le présenter, on voudrait en faire un mouvement comme un autre, alors qu’il s’agit d’une façon d’être au monde, et tout autant, de refuser la misère pour en dénoncer l’injustice, que pour y chercher l’émerveillement.
C’est pour cela qu’il y a un véritable contresens dans la façon dont les choses nous sont présentées aujourd’hui dans les musées qui accumulent des valeurs sûres, qui accumulent des œuvres d’art pour essayer de faire oublier que le surréalisme est lié à ce refus du monde tel qu’il est. Ce n’est pas par hasard que les surréalistes n’ont cessé de réaffirmer une sorte de foi dans ce qu’André Breton a appelé le « génie de la jeunesse », parce qu’il s’agit de réveiller en chacun ce qu’il y a de totalement vierge, de réveiller ce que chacun, quand il est amoureux, quand il est jeune, essaye d’apporter au monde, d’ajouter au monde.
Par ailleurs il faut se souvenir des connivences entre les expériences surréalistes et la pensée psychanalytique freudienne, l’idée d’aller explorer l’inconnu, d’aller explorer ce qu’il y a en profondeur, l’inconscient, l’insolite, de passer par-dessus les barrières des apparences, voilà qui était profondément dérangeant, subversif, pour la conscience bourgeoise de l’époque. Et pourtant voilà une contribution du surréalisme à un changement radical de la condition humaine.
Ajoutons que le surréalisme a nommé la sexualité, qu’il a mise en scène, ce qui est indissociable de la valorisation sans limite de l’amour comme forme suprême de l’existence. Il en est de même de l’exposition de la nudité, du corps féminin en particulier. Le surréalisme pose la question de la vérité du sexe et plus généralement de la liberté.
Né de l’absurdité de la Guerre de 14-18, on peut avancer qu’il n’existe aucun mouvement artistique, philosophique, révolutionnaire qui à l’instar du surréalisme ait eu le projet de considérer l’homme tout entier, c’est-à-dire de le comprendre avec sa sensibilité, sa raison, sa sexualité, sa révolte, ses peurs et sa soif d’infini.
Les surréalistes chercheront à dénouer l’ensemble des contraintes sociales qui enchaînent l’homme et paralysent la spontanéité créatrice de l’individu : la famille, l’armée, la religion, la police. Inévitablement apparaîtront les contradictions internes des systèmes politiques tels que le marxisme-léninisme ou le prétendu « surréalisme au service de la révolution ». Ces contradictions expliquent partiellement la lente agonie du mouvement des années 1940 aux années 1960.
Chercher l’émerveillement, refuser le monde tel qu’il est, voilà ce que proposaient les surréalistes. Il existe en ce moment une exposition dont des artistes de notre temps en font le programme. Avec spontanéité, générosité, humour et talent ils remettent le couvert à la Halle Saint Pierre à Paris. HEY ! MODERN ART ET POP CULTURE. PARTY II.
http://www.hallesaintpierre.org/
Exposition actuelle
HEY! modern art & pop culture / Part II
25/01 – 23/08 2013
Halle Saint Pierre
ouvert tous les jours. Adresse : 2 Rue Ronsard, 75018 Paris. Téléphone : 01 42 58 72 89